Renforcement des institutions locales au Salvador : Le dialogue et la négociation comme moyen d'approfondir la démocratie

Ana Miriam Salgado Alvarenga a 56 ans et est originaire de la ville de Santiago de María, dans l'ouest du petit pays qu'est le Salvador.

Elle est la quatrième de cinq enfants, avec trois frères plus âgés et une sœur plus jeune. Son père était automobiliste ; sa mère fabriquait et vendait des friandises sucrées à base de noix de coco, une spécialité typique du Salvador.

En 1995, elle a obtenu un diplôme en informatique. Mais bien avant cela, dès la fin de ses études secondaires, elle a commencé à travailler dans le domaine du développement local.

C'est ainsi qu'elle a trouvé sa voie en tant que conseillère municipale en développement local.

Après l'université, elle est entrée à l'Institut de développement local du Salvador (ISDEM) en tant que conseillère pour la région orientale du pays.

L'ISDEM est chargé de fournir une assistance technique et de renforcer les capacités des 262 municipalités du Salvador. Ana Miriam est actuellement responsable de neuf d'entre elles et leur fournit un soutien technique, administratif, financier et de planification afin de les aider à mieux remplir leurs rôles et responsabilités.

Vers des conseils municipaux multipartites

Lorsque Ana Miriam a commencé à travailler, les gouvernements locaux étaient élus selon un système uninominal à un tour ; le parti politique qui obtenait la majorité simple remportait tous les sièges du conseil municipal.

Toutefois, ce système a changé en 2015 et, pour la première fois dans l'histoire politique du pays, les conseils municipaux étaient composés de différents partis.

Ce changement représente sans aucun doute une occasion unique d'approfondir la démocratie et de promouvoir de nouveaux styles de gouvernance municipale.

Cependant, malgré les avantages évidents que le multipartisme offre à la démocratie et à la culture politique du pays, sa mise en œuvre comporte ses propres défis.

Les membres des conseils municipaux, les partis politiques et les organismes publics chargés de renforcer les capacités et d'apporter un soutien technique se sont inquiétés du fait que le changement, au lieu de renforcer les municipalités, les entraverait.

Les conseils municipaux multipartites pourraient entraîner un risque de polarisation, une augmentation des conflits et une tendance accrue à la défection.

Formation des facilitateurs de dialogue

Compte tenu de ces préoccupations, le NIMD a décidé de mettre en place des préparatifs, tant au sein des conseils municipaux eux-mêmes que dans le cadre de son travail avec les conseillers municipaux de l'ISDEM et de la Corporation des municipalités de la République du Salvador (COMURES), afin de les aider à faire face au changement et à résoudre de manière constructive les conflits qui pourraient surgir.

C'est dans ce contexte qu'a été lancé le programme "Formation de facilitateurs de dialogue et de négociation politique pour le consensus dans le cadre de la mise en place de conseils municipaux multipartites".

La première phase de ce programme s'adressait aux conseillers municipaux qui travaillaient au niveau national et a été mise en œuvre dans la capitale, San Salvador.

La deuxième phase, un projet pilote, a permis de former des experts techniques dans 10 municipalités des quatre régions du Salvador, qui ont ensuite partagé leurs connaissances avec les conseils municipaux. Au total, 36 experts ont été formés, 31 de l'ISDEM et 5 de COMURES, 18 femmes et 18 hommes.

Ensemble, ces experts apportent leur soutien à l'ensemble des 262 municipalités du Salvador.

Le dialogue et la négociation comme outils clés

Ana Miriam était l'une des participantes de l'ISDEM. Sa vaste expérience dans le domaine municipal, son interaction avec ses collègues, sa capacité et son ouverture à de nouvelles idées l'ont distinguée tout au long de la formation.

Dans le cadre de son évaluation, Ana Miriam a dû mettre à l'épreuve ses nouvelles compétences. Elle a animé un atelier sur le dialogue et la négociation politique en vue d'un consensus au sein d'un conseil municipal.

L'atelier a été un grand succès. Les membres du Conseil l'ont trouvé très pertinent et efficace pour améliorer l'atmosphère entre eux.

Plus précisément, ils lui ont demandé son soutien pour résoudre un problème qu'ils avaient rencontré. Peu avant la session, le parti au pouvoir n'avait pas tenu compte de l'opposition lorsqu'il avait demandé un prêt pour réaliser des projets correspondant à ses propres intérêts. Cela a provoqué un conflit au sein du conseil, puisque de telles décisions ne devraient être prises qu'à la majorité qualifiée (3/4 des membres du conseil).

Ana Miriam était consciente de la sensibilité de cette question dans le nouveau contexte multipartite.

Elle a pris le temps de permettre aux participants de surmonter leurs différences par le dialogue, la négociation et la coopération. Chaque participant a eu l'occasion d'exprimer son opinion et de suggérer des solutions possibles.

Cette nouvelle façon de travailler ensemble a aidé les participants à surmonter leurs différences et le conseil a approuvé le prêt à l'unanimité, en l'affectant aux dettes en cours et à un certain nombre de projets d'infrastructure dans l'intérêt commun.

Ana Miriam a obtenu les meilleures notes pour ce travail. En effet, tout au long de la formation, elle a fait preuve d'une évolution et d'une croissance réelles et, le dernier jour, elle a été désignée par ses collègues diplômés pour prononcer un discours devant plus de 150 personnes.

Le directeur général de l'ISDEM, Juan Alfredo Henríquez, a également pris la parole lors de l'événement :

"Je suis optimiste quant à ce programme et surtout quant à la manière dont nos facilitateurs ont déjà pu transmettre leurs connaissances dans certaines municipalités. Ils sont maintenant en mesure de continuer à effectuer leurs évaluations en utilisant ces méthodes avec beaucoup plus de gouvernements locaux dans le pays. Cela n'aurait pas été possible sans le soutien que nous recevons dans le cadre d'un accord inter-organisationnel avec le NIMD".

Changements personnels et professionnels

Grâce à ses compétences et connaissances nouvellement acquises, Ana Miriam a déjà pu apporter son soutien à diverses municipalités à leur demande.

Elle a facilité le dialogue et les processus de négociation dans un certain nombre de conseils municipaux qui, en raison de conflits, étaient confrontés à des blocages dans l'approbation de projets, de plans stratégiques ou même de prêts.

À la suite de la formation, Ana Miriam se sent également mieux armée pour relever les défis de sa vie professionnelle et personnelle :

"Le cours m'a permis d'être plus ouvert à la critique dans mon travail, plus ouvert à ce que les conseils municipaux pourraient dire. La clarté accrue vous aide à leur parler plus facilement. J'ai pu résoudre des cas isolés dans différents conseils.

Sur le plan personnel, il est beaucoup plus facile d'écouter la famille, de résoudre les problèmes et d'aider de manière plus efficace. L'un des aspects de ma vie où il m'a été le plus facile d'appliquer ce que j'ai appris est mon travail avec les jeunes et les adultes en tant qu'entraîneur bénévole de basket-ball.

Il est plus facile maintenant de s'asseoir, d'écouter et de leur parler de la formation. Avant, je disais "faisons ceci ou cela". Maintenant, je leur demande plutôt ce qu'ils pensent, si quelque chose leur sera utile. Avant, je leur disais ce qu'il fallait faire, maintenant j'écoute".

Anna Miriam réfléchit à l'impact plus large de son travail :

"Depuis l'âge de 18 ans, ma principale motivation pour travailler dans mon domaine est la possibilité d'aider les municipalités à résoudre leurs problèmes et à instaurer la confiance.

Si les municipalités ne sont pas fortes et si le pays n'est pas à l'écoute des besoins de la population au niveau local, il ne peut y avoir de progrès. Les choses stagnent. Si nous ne canalisons pas le soutien, cela n'aide personne et n'a aucun impact sur le pays. Il est essentiel de travailler au niveau local".

Ana Miriam croit fermement au dialogue et à la négociation comme moyen de parvenir à des accords durables dans la vie personnelle, avec la famille et aux niveaux communautaire, municipal et national.

Grâce au soutien du NIMD, Ana Miriam et de nombreux autres conseillers municipaux sont désormais en mesure de travailler à la construction d'une culture politique plus démocratique et au renforcement du système politique salvadorien par la mise en œuvre réussie du multipartisme au niveau local.