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Réflexions d'un jeune dirigeant kenyan sur la table ronde avec le roi et la reine des Pays-Bas

Publié le 09-04-2025
Temps de lecture 4 minutes
  • Kenya
  • Histoires
  • Les jeunes en politique

Une invitation qui a fait bouger un village

Lorsque Marion, une ancienne élève de l'école de la démocratie du NIMD Kenya, a reçu le courriel l'invitant à une table ronde avec le roi et la reine des Pays-Bas, elle était, selon ses propres termes, "nerveuse mais extatique" et a dit en plaisantant qu'elle l'avait "raconté à tout son village". Ce n'est pas seulement le poids du moment, sa première interaction avec une monarchie, mais aussi la gravité des questions abordées qui l'ont rendue anxieuse. Au-delà de l'excitation, c'est un sentiment plus profond de responsabilité qui l'habite. Face à l'indignation générale suscitée en ligne par la visite des monarques, elle savait que son rôle dans la discussion devait aller au-delà de son propre point de vue.

Le poids de la représentation

En entrant dans la salle, Marion s'est rapidement rendu compte qu'elle était l'une des dix jeunes présents (bien loin des centaines qu'elle avait imaginés). Cela a tout changé. L'intimité de la salle signifiait que chaque voix, y compris la sienne, avait du poids. Elle devait s'assurer que les préoccupations qu'elle soulevait transcendaient son expérience personnelle et parlaient de la réalité plus large de l'engagement politique des jeunes au Kenya.

Consciente du scepticisme qui entoure cette visite, elle s'y est préparée. Elle a fait des recherches approfondies, s'assurant que ses arguments étaient étayés par des données. La formation au dialogue et au dialogue intergénérationnel qu'elle a reçue en tant qu'ancienne élève de l'École de la démocratie l'a aidée à affiner ses arguments, ce qui lui a permis de défendre efficacement les questions relatives aux jeunes tout en engageant la monarchie dans une discussion équilibrée et informée.

Une conversation au-delà des attentes

Comme beaucoup de jeunes Kényans, Marion avait abordé la table ronde avec un certain scepticisme. Elle pensait que la discussion serait une formalité, un simple contrôle diplomatique avant que le roi et la reine ne se rendent à State House pour discuter d'accords commerciaux avec le président du Kenya. Elle s'attendait aux habituels sentiments politiquement corrects sur les questions relatives à la jeunesse, dont elle avait été témoin à maintes reprises, et non à un échange honnête d'idées.

À sa grande surprise, les monarques ont fait preuve d'une compréhension approfondie du paysage politique kenyan. Ils ont reconnu l'apathie des électeurs lors des élections de 2022 et le regain d'intérêt des jeunes pour la participation politique. Le roi a ouvertement évoqué les dangers auxquels les jeunes militants sont confrontés lorsqu'ils demandent des comptes au gouvernement en ligne et les a encouragés à canaliser leur énergie dans la défense des réformes électorales telles que la reconstitution de la Commission électorale indépendante et des circonscriptions électorales (IEBC) et l'inscription sur les listes électorales.

Le roi a notamment applaudi de jeunes militants comme Morara Kebaso et Kasmuel Mcoure (figures influentes des manifestations de l'année dernière) qui étaient en train d'intégrer des structures politiques formelles. Morara est en train de fonder son propre parti politique, tandis que Kasmuel a officiellement rejoint le Mouvement démocratique orange (ODM). Le roi a insisté sur la nécessité pour les jeunes de se rallier à des dirigeants qui accordent la priorité aux questions relatives à la jeunesse plutôt que de se contenter de soutenir les positions et les bastions traditionnels des partis.


Tension, confiance et transformation

L'atmosphère de la table ronde a d'abord été tendue. Le groupe était composé de jeunes issus de divers partis politiques, de la société civile et de cercles d'activistes. Certains des jeunes activistes présents ont ouvertement exprimé leur mécontentement quant à leur présence, soulignant le fossé croissant entre les jeunes engagés politiquement et ceux qui continuent à rejeter les structures politiques formelles au profit de l'activisme.

Cependant, au fur et à mesure de la discussion, le ton a changé. Le roi et la reine s'assoient parmi les participants. Ce geste, bien qu'apparemment anodin, témoigne d'un véritable intérêt pour l'écoute, ce qui adoucit les voix les plus sceptiques de la salle, y compris celle de Marion.

La présence de l'ambassadeur néerlandais Henk Jan Bakker a également joué un rôle crucial dans l'établissement de la confiance. Marion avait déjà eu des contacts avec lui lors de l'événement Political Café en décembre 2024, le forum de dialogue informel du NIMD Kenya permettant aux jeunes de discuter des questions politiques émergentes avec des dirigeants et des experts politiques. Son encouragement indéfectible à des discussions ouvertes et honnêtes l'a rassurée, elle et les autres, sur l'importance de leur voix, ce qui a contribué à atténuer l'hostilité initiale dans la salle.


Au-delà de la table ronde : Quelle est la prochaine étape ?

Marion a quitté la discussion avec une perspective plus nuancée sur les processus de dialogue. Elle reste convaincue que le Kenya a encore un long chemin à parcourir avant que de telles conversations puissent avoir lieu de manière significative entre les jeunes et les hauts responsables politiques. La confiance mutuelle, l'écoute active et, peut-être plus important encore selon Marion, l'humilité des hauts responsables sont des conditions préalables à un véritable engagement.

Pour les jeunes qui pourraient se retrouver dans des discussions de haut niveau similaires, son conseil est clair : Préparez-vous, parlez avec courage et n'oubliez pas que vous représentez bien plus que vous-même. La recherche, la clarté et la conviction transforment une voix unique en un mouvement.

Les enseignements du monarque

Le roi s'est engagé à aborder les questions clés discutées avec le président kenyan lors de leur rencontre bilatérale, notamment :

  • Les obstacles à l'inscription sur les listes électorales, en particulier la charge financière liée à l'obtention des cartes d'identité nationales.
  • Le mépris croissant des processus démocratiques et la suppression des voix des jeunes.
  • Les défis structurels au sein des partis politiques qui limitent la participation des jeunes.
  • Le rejet par les dirigeants élus des efforts de responsabilisation menés par les jeunes.


Une vue d'ensemble : Engager les jeunes au-delà de la table ronde

Bien qu'une table ronde ne puisse à elle seule relever les défis politiques du Kenya, elle souligne l'importance d'un engagement soutenu. Les écoles de la démocratie du NIMD Kenya jouent un rôle crucial en préparant de jeunes leaders comme Marion à de telles conversations. En les dotant de compétences en matière de dialogue politique, d'analyse critique et de gouvernance, ces écoles contribuent à combler le fossé entre les structures politiques et les jeunes.

Alors que le Kenya se dirige vers les élections de 2027, les jeunes ont le choix : s'engager ou se désengager. L'expérience de Marion lors de la table ronde nous rappelle que le scepticisme est justifié, l'engagement par le biais de différentes voies est crucial.